Soirée à Saint-Philbert-de-Grandlieu

      Lors d'une chaude soirée d'été, accompagnant une personne à une réunion tardive, j'ai eu le loisir de sillonner à pieds la commune de Saint-Philbert-de-Grandlieu.

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      L'abondance des ressources vivrières du lac a permis une installation très ancienne de petites communautés humaines et ce, malgré les conditions de vie dans un milieu humide. Ainsi, la trace la plus ancienne attestant de la présence humaine en ces lieux demeure le nom probablement attribué par les Romains à ce hameau originel : " Déas ". L'actuel toponyme, la commune le doit au moine et évangélisateur saint Philibert de Tournus. Ce dernier avait fondé une abbaye sur l'île de Noirmoutier au VIIème siècle, mais les attaques et pillages répétés des Normands à partir de 814 font fuir les moines. Ils abandonnent l'île avec la châsse du saint fondateur. Pour leur nouveau monastère, ils pensent trouver le cadre idéal à Deas, puisqu'à l'intérieur des terres, il sera davantage à l'abri des raids côtiers normands. Ils obtiennent d'ailleurs l'autorisation de l'empereur Louis le Pieux (fils de Charlemagne) lui-même. Ironie de l'histoire, les Normands saccageront encore et encore la nouvelle abbaye jusqu'au milieu du IXème siècle, les moines déménageront finalement jusqu'à Tournus en Bourgogne, mais ils laisseront une partie des reliques derrière eux. Aujourd'hui, de l'abbaye reconstruite ne subsiste plus que l'abbatiale, joyau de l'art carolingien, la crypte de style roman, ainsi que le précieux sarcophage en marbre de saint-Philibert. Récemment, les jardins médiévaux ont aussi été reconstitués à l'arrière du bâtiment, près de la Boulogne (rivière de 81 Km).


A gauche : l'abbatiale et l'ancien prieuré, à droite la façade arrière de l'abbatiale.
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      Aujourd'hui, les Philibertins sont un peu moins de 8.500, répartis sur 59 Km² (une des communes les plus vastes du département). Seulement le lac de Grandlieu, avec une superficie d'environ 63 Km² (moins en été), y occupe la majeure partie. C'est une autre composante du toponyme de la commune, en effet, "Grand-Lieu" signifiait sans doute " grand lac " dans le parlé médiéval local. D'ailleurs pour éviter la redondance, ici, il est plus courant de dire "je viens de Grandlieu " et non pas " je viens du lac de Grandlieu ". Alimenté en eau par l'Ognon, la Boulogne et la Logne, il est toujours riche en mammifères, en poissons, en espèces d'invertébrés et également en essences botaniques remarquables. C'est notamment le second lieu le plus riche de France - après la Camargue - pour la variété et la rareté de ses populations d'oiseaux présentes ou de passage sur les routes migratoires. A ce titre, le lac est devenu propriété de l’État et Zone Naturelle Protégée en 1980. Bien que la pêche, la chasse et la navigation y soient très strictement limitées, le lac conserve des activités économiques telles les pâturages estivaux dans les prairies marécageuses.

      Enfin, pour les plus rêveurs d'entre nous, n'oublions pas que de nombreuses légendes populaires gravitent autour du lac à l'image du mystérieux cheval Mallet, de la créature surnaturelle prisonnière sur l'île Dun, des miracles de la fontaine de Saint-Rachoux, de la cité engloutie d'Herbauges... .

A suivre :
Le Lac de Grandlieu, un site naturel à l'équilibre précaire.

Pour en savoir plus :

ici, le site de l'abbatiale de Saint-Philbert-de-Grandlieu (consulté 25.07.2014).
ici, les amis du Lac de Grandlieu et de ses marais, site très documenté sur l'environnement du site, (consulté le 25.07.2014).
BALANÇA (E.), Grand-Lieu, un lac tropical en Pays nantais, Verrières, 118 p, 2003. 
BRUNELLIERE (G.), Histoire de Saint-Philbert-de-Grandlieu & alentours, Rennes,‎ 302 p, 2009.
DE GRANDMAISON (H.), Un extraordinaire combat pour la maîtrise de l'eau en Pays de Retz et marais breton, Laval,‎ 126 p, 2009.
GIORDANO-ORSINI (A.), sous la direction de CROIX (N.) et RENARD (J.), Saint-Philbert-de-Grandlieu, un bourg sous influence de l'agglomération nantaise, Nantes, mémoire de maîtrise en géographie, 266 p, 1996.
KERVAREC (M.), Terroir et Moyen Age au Pays nantais, Rezé Les Sorinières Vertou Nantes Bouguenais Pont-Saint-Martin La Bignon Basse-Goulaine Saint-Sébastien Saint-Philbert-de-Grandlieu Carquefou, Nantes, 425 p, 1999.
MARION (L.), Le Lac de Grand-Lieu, un joyau tropical à préserver, Paris, Société de la protection de la nature,‎ 62 p, 1999.
MARTINEZ (S.), sous la direction de CROIX (N.), Maraîchage entre Saint-Philbert-de-Grand-Lieu et les Sorinières de 1989 à 2000, mémoire de maîtrise en géographie, Nantes, 115 p, 2000.
MESNIER (N.), PAPIN (A.), BAUD (O.), Abbatiale IXe siècle Saint-Philbert-de-Grand-Lieu, Rennes, 32 p, 1994.
PIERRELEE (D.), Élevage et paysage à Grand-Lieu XIIe ‑ XIXe siècle, in Bulletin de la Société des historiens du pays de Retz, n° 25, 17 à 24 pp,‎ 2006. Très intéressant et concis.
PIERRELEE (D.), Grand Lieu lac et marais, mémoire des paysages entre Loire et baie, Nantes, 294 p, 2004.

H.M

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