L'Abbaye de Noirlac

      En 2004, je découvrais une passion qui ne m'a d'ailleurs pas quitté depuis : la photographie. Et le moins que l'on puisse dire... mes premiers milliers de clichés n'étaient pas vraiment d'une qualité époustouflante ! Jusqu’à très récemment, je ne les regardaient même plus.


      Or justement en 2004, je découvrais avec ma famille la vaste abbaye cistercienne de Noirlac, un patrimoine remarquable dans le Berry.

Le cellier de l'abbaye de Noirlac.
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Repères chronologiques

1136 : fondation de l'abbaye par un petit groupe de moines venus de Clairvaux en Champagne, dans un contexte d'apogée du monachisme européen (la création de monastères est fréquente pour accueillir l'ensemble du clergé régulier). Elle est en effet le reflet  de l’ascétisme monacal de l’ordre cistercien développé par Saint-Bernard. Les terres occupés par les moines sont inhospitalières à cause des forêts, du lac de Noir Lac et d'une zone marécageuse.

1150 : le seigneur Ebbes V de Charenton, propriétaire des terres, octroie par charte des droits seigneuriaux à l'abbaye, c'est à dire que les moines sont désormais propriétaires de terres, d'une partie des bois et du cours d'eau, ainsi que d'un moulin.

Jusqu'en 1160 : construction de l'église.

Entre 1170 et 1190 : construction de la moitié du cloître, de la salle capitulaire (salle réunion des moines et salle de lecture), du dortoir des moines, et du bâtiment des convers (moines chargés des travaux de la terre, de la cuisine etc... dans une abbaye, les autres moines se consacrent exclusivement à "l’œuvre de Dieu").

1189 : confirmation de la donation. L’abbaye prospère car elle perçoit dîmes, rentes et revenus seigneuriaux.

XIIIème : le domaine de l'abbaye s'agrandit (le clergé peut lui aussi être un seigneur), il gagne en vignes, bois (275 Ha), étangs, moulins, granges (14).

1423 : dans un contexte de Guerres franco-anglaises et de brigandage, l’abbaye est fortifiée, afin de la protéger des bandes armées qui ravagent régulièrement la campagne. Les moines bâtissent un donjon (aujourd'hui disparu), ceinturé de douves, dans le prolongement du cellier.

Fin XVème : la communauté de Noirlac traverse une crise morale profonde (enrichissement massif conduisant à des dérives). Les archives signalent un moine "apostat" ainsi qu’un frère meurtrier.

1530 : l'abbé dirigeant l'abbaye est désormais nommé par le roi en dehors de la communauté.


Vue aérienne de l'ensemble cistercien de Noirlac dans le Cher.

1569 : la guerre civile opposant les catholiques et les huguenots fait rage. Une troupe protestante pille l'abbaye.

1650 : les bâtiments sont gravement endommagés par les passages successifs des troupes royales ou rebelles dans la région lors de la Fronde contre Louis XIV. Pendant 70 ans, et malgré quelques restaurations, l'abbaye est dans un triste état. 

1730 : les moines entreprennent de vastes travaux de reconstruction en remaniant notamment en profondeur l'aile des moines.

1791 : pendant la Révolution, l'abbaye est sécularisée puis vendue au titre des Biens Nationaux.

A partir de 1820 : un britannique achète les terres et transforment les bâtiments en manufactures de porcelaine. Certaines modifications sont effectuées sur les bâtiments, elles entraînent l'effondrement d'une partie du cloître.

1837 : Prosper Mérimée visite le site qui se dégrade encore. Ses conclusions sont sans appel : " Il est à regretter qu'une église aussi vaste, et à certains égards aussi remarquable que celle de Noirlac, ait reçu une destination qui la dénature si complètement. [...] la nef est devenue un magasin et il n'est pas une salle ancienne ou moderne, à laquelle les besoins de la manufacture n'aient apporté de grands et tristes changements."

1866 : la manufacture de porcelaine cesse, elle est déménagée sur un site encore existant de nos jours. Malgré les dégâts causés par les installations industrielles, paradoxalement, l'activité économique a permis la sauvegarde du site car l'abbaye n'a pas servit de carrière de pierre comme bons nombres de monuments médiévaux.

1894 : une première remise en état est lancée accompagnée de fouilles archéologiques.

1909 : le département du Cher se porte acquéreur de l'abbaye. 

Entre 1909 et 1939 : l'ancienne abbaye cistercienne sert de camps de vacances, puis de logement pour des troupes étasuniennes (1918) et enfin de camps de réfugiés espagnols.

1950-1980 : importants travaux de restauration.

***
      The construction of the abbey of Noirlac was started in 1150 by a small group of monks who came from Clairvaux. The abbey expressed the monastic asceticism of the Cistercian order founded by Saint-Bernard. From the XVIth century to the French Revolution, the few monks in residence dedicated their time to the management of the community estate as well as to the spiritual life. In 1791, the abbey is seized as a public property. It then became a china factory during a major part of the XIXth century. The monument became the property of the Cher department in 1909 and was the subject of a remarkable rehabilitation from 1950 to 1980, which gave back to the abbey its authentic character reflecting its original blueprint. The abbey took the path of modernity when new stain-glass windows were ordered from the contemporary artist Jean-Pierre Raynaud.









Pour en savoir plus :

ici, une visite virtuelle très bien réalisée malgré les images en HDR grossières.

Girault (J.P.), De Buhren (N.), (dir.), Abbayes cisterciennes en Berry (Cher, Indre), Orléans, coll. « Itinéraires du Patrimoine » (n° 164),‎ 1998
Sodigné-Loustau (J.), L'accueil des réfugiés civils espagnols de 1936 à 1940. Un exemple : la région Centre, in Matériaux pour l'histoire de notre temps, 44,‎ 1996. Consultable : ici.

H.M

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